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Chapitre 1: Le marché du travail

 

PLAN

(Cliquez sur un titre pour vous y reporter)

      Introduction                        

I - La population active

A/ Mesure et évolution

1-Définitions

2-Evolutions

B/ Les déterminants de la population active

1-Les déterminants démographiques

2-Les déterminants socioculturels

C/ Ses caractéristiques

1-La féminisation

2-La tertiarisation

3-La salarisation

4-La qualification

II -  Le chômage

A/ L’évolution du chômage

1-Dans les PDEM

2-En France

B/ L’analyse du chômage

  1. Les différentes typologies

  2. Les causes du chômage

C/ La lutte contre le chômage

1-Les différentes positions théoriques

2-Les politiques de l’emploi

III -  Les nouvelles formes d’emploi

A/ Les FPE

1-Les différentes catégories

2-Evolution en France

B/ La flexibilité

1-Les différentes formes de flexibilité

2-La flexibilité en France

C/ Les nouvelles formes d’organisation du travail

1-Les crises du Taylorisme

2-Les nouvelles méthodes de travail

Conclusion


Introduction

+ Le marché du travail est le lieu où se rencontrent l’offre de travail qui émane de la population active, et la demande de travail qui provient des unités productives. C’est donc un marché particulier qui subit les contrecoups des transformations affectant à la fois la population active et l’emploi. Ses mutations sont d’ordre quantitatif et qualitatif.

+ Nous étudierons pour commencer la population active, puis nous nous intéresserons au chômage avant de voir quelles sont les nouvelles formes d’emploi qui apparaissent aujourd’hui.

I- La population active

A/ Mesure et évolutions                                                            

1- Définitions

+ La population active est définie par le Bureau International du Travail (BIT) comme l’ensemble des personnes qui exercent ou cherchent à exercer une activité rémunérée. Elle comprend donc deux sous-populations la Population Active Occupée (PAO) composée des personnes ayant un emploi et la Population sans emploi à la recherche d’un emploi (PSERE) qui est constituée par les chômeurs.

La population active représente les ressources en main d’œuvre d’un pays.

+ Le taux d’activité exprime en pourcentage le rapport de la Population active sur la Population Totale du pays considéré =(PA/PT)x100. On peut le considérer en fonction du sexe et de l’âge des individus (ex : actifs de 15 à 65 ans/ personnes de 15 à 65 ans ou encore actifs masculins/ population totale masculine etc.)

La population inactive comprend les femmes au foyer, les élèves et étudiants, les retraités et jusqu’en 1990 les appelés du contingent.

2- Evolutions

+ Depuis 1950, la PA augmente dans les PDEM quoique de façon diversifiée : fortement aux EU (+120% entre 1950 et 1997 ainsi qu’au Japon (+90%), et de façon moindre dans les pays européens :+40% en Allemagne, +35% en France, +30% au RU et +20% en Italie.

On remarque que les évolutions de l’emploi reflète à peu de choses près cet ordre, puisque entre 1950 et 1997 il augmente de 117% aux E-U, de 85% au japon, de 38% en Allemagne, de 17% au RU, de 15% en F et de 8% en Italie. Mais dans tous ces pays, c’est la PA qui croît le plus rapidement.

Depuis 1973, on peut dire qu’il y a, dans les PDEM 3 groupes de pays :

E-U et Canada où la PA et l’emploi augmentent rapidement (autour de 2% par an en moyenne de 1973 à 1996)

Japon, Pays-Bas et Irlande dans lesquels la PA et l’emploi augmentent assez rapidement (environ 1% par an en moyenne au cours de la même période)

Les autres pays européens où l’emploi stagne (<+0,4% par an en moyenne), alors que la PA augmente davantage (de +0,4 à +0,7% par an moyenne de 1973 à 1996).

+ Les taux d’activité ne retiennent pas ce classement car en 1992 c’était le RU qui avait le plus fort taux d’activité (62,2%) et l’Italie le plus faible (48,8%). Mais dans tous les PDEM les taux d’activité restent relativement élevés avec environ 1 personne sur 2 qui y est active en 1992 contre seulement 2 sur 5 en 1983. Mais cette évolution est fonction du sexe car le taux d’activité est en baisse chez les hommes tandis qu’il augmente chez les femmes. En 1997 le taux d’activité masculine était le plus élevé au Japon (78%) et le plus faible en Italie (60%), alors que le taux d’activité féminine le plus élevé se trouvait aux Etats-Unis (60%) et le plus faible en Italie (35%).

Depuis 1979 la part des femmes dans l’emploi total a progressé dans l’ensemble des PDEM : on peut dire que sur 5 actifs plus de 2 sont des femmes aujourd’hui, contre seulement 1 sur 3 en 1979. C’est aux EU qu’elles sont les plus nombreuses (45,2% de l’emploi total en 1989), alors que c’est en Italie qu’elles sont les moins représentées (34,7% à la même date). On remarque aussi que les femmes sont sur-représentées dans l’emploi à temps partiel :environ 3 actives sur 4.

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B/ Les déterminants de la population active                        

Ce sont des déterminants à la fois démographiques et socioculturels (schéma transparent)

1- Les déterminants démographiques

Il s’agit de l’accroissement naturel et des flux migratoires.

+ L’accroissement naturel est le 1° déterminant démographique : Il est certain que le Baby Boom est l’un des responsables du fort accroissement que connaît la population active depuis le milieu des années 60. Les classes nombreuses d’après-guerre se présentent encore aujourd’hui sur le marché du travail (études longues jusqu’à près de 30 ans pour les derniers nés en 1968/69), mais ce flux devrait se tarir avec leur remplacement par les classes creuses nées après 1970. De plus, le départ en retraire des 1° Baby Boomers en 2006 devrait encore permettre à la PA de se réduire de façon significative.

+ Les flux migratoires sont quant à eux officiellement taris en France depuis le début de la crise : la loi STOLERU de 1974 a posé le principe d’un solde migratoire (immigration - émigration) nul.

L’immigration avait été officielle dans les années 50 et 60 par l’intermédiaire de l’ONI pour pallier le manque de main d’œuvre. Les entrées d’immigrées se sont situées dans une fourchette allant de 100 000 à 250 000 par an, avec un maximum atteint en 1970. Depuis 1974 les entrées sont inférieures à 100 000 par an et correspondent à des rapprochements familiaux (l’immigration clandestine n’est pas comptabilisée : <20 000 par an).

L’Allemagne et les EU ont aussi recouru à l’immigration. En Allemagne on a compté plus d’1 million d’immigrants en 1970. De 1980 à 1989 l’Allemagne a dû sa croissance démographique à la seule immigration. Depuis 1989 celle-ci se fait grâce à l’Allemagne de l’Est dont la démographie est plus dynamique.

 2- Les déterminants socioculturels

Il s’agit de la durée de la scolarisation, de l’âge de la retraite et de l’activité féminine.

+ La durée de la scolarité est un facteur qui influence aujourd'hui la population active à la baisse. On doit considérer d’une part la généralisation de la scolarisation à tous les groupes sociaux et d’autre part l’allongement de la durée des études.

Ainsi (transparent) en France, alors qu’en 1967/68 le taux de scolarisation n’était que de 39% à 17 ans, ce taux est passé à 95% en 1987/88 grâce à une plus grande ouverture de l’enseignement secondaire et supérieur. En 1968 20% d’une classe d’âge seulement accédait au niveau d’études supérieures, ils sont plus de 50% en 1990, l’objectif officiel étant 80% en 2 000. Cet objectif est déjà atteint en Allemagne, aux EU et au Japon (moins exigeants).

L’allongement de la durée des études est un phénomène plus récent qui pousse les étudiants à poursuivre jusqu’à près de 30 ans leurs études afin d’atteindre le niveau le plus élevé possible susceptible de les protéger du chômage.

+ L’âge de la retraite influence aussi la population active à la baisse. En France cet âge a été avancé de 65 à 60 ans en 1982. Mais alors que la retraite est un avantage largement généralisé en Europe, ce n’est pas le cas aux EU et au Japon où elle reste un avantage réservé aux seuls salariés des grandes entreprises.

+ L’activité féminine est quant à elle un facteur qui influence la PA à la hausse. Ce n’est pourtant pas un phénomène récent mais la féminisation de l’activité était masquée par la nature de celle-ci. En effet les femmes travaillaient souvent dans l’exploitation familiale (agricole, commerce) et n’étaient pas déclarées actives. Aujourd’hui elles travaillent davantage à l’extérieur et sont plus souvent salariées.

De même, elles s’arrêtent moins souvent de travailler, même après la venue d’un enfant. Ainsi (transparent) en 1991, 75 à 80% des femmes étaient actives entre 30 et 50 ans contre seulement 40 à 50% en 1982. On constate que l’activité des femmes augmente tandis que celle des hommes diminue. Entre 1982 et 1996 le marché du travail en France a enregistré 167 000 femmes de plus et 176 000 hommes de moins. Mais ce sont surtout les femmes de 25 à 49 ans dont l’activité augmente, tandis que pour les <25 ans et les >55 ans leur taux d’activité évolue à la baisse comme chez les hommes:

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C/ Les caractéristiques de la PA                                        

Il s’agit de modifications plutôt qualitatives que quantitatives : féminisation, tertiarisation, salarisation et qualification.

1- La féminisation

+ Les femmes sont en progression dans toutes les CSP, mais elles sont plus présentes dans certaines catégories. Ainsi, en France, elles dominent dans les catégories les moins qualifiées : 70% des employés dont 80% des personnels de service, alors qu’elles représentent 40% environ des professions intermédiaires et seulement 25% des cadres supérieurs. Elles sont également moins représentées chez les non salariés, agriculteurs exploitants et les artisans commerçants et chefs d’entreprise, ainsi que chez les ouvriers : environ 10%.

+ L’activité féminine s’explique par l’émancipation des femmes, c’est-à-dire leur volonté d’être indépendantes financièrement et de faire une carrière professionnelle, mais aussi par la nécessité de gagner leur vie à la suite de l’évolution familiale (familles monoparentales en particulier). De plus les femmes ont moins d’enfants et peuvent en contrôler la venue grâce à la contraception. Mais elle s’explique aussi par la tertiarisation et la montée de la fonction publique où elles trouvent moins de discrimination à l’embauche. Les femmes représentent ainsi environ 75% des effectifs du secteur tertiaire. Enfin les femmes sont aussi plus touchées par la précarisation car elles ont souvent des emplois à temps partiel plus ou moins voulus pour concilier vie familiale et vie professionnelle : en 1996 les femmes représentaient 81,7% des travailleurs à temps partiel (4 sur 5, c’est-à-dire 4 fois plus que les hommes).

2- La tertiarisation

+ Le secteur tertiaire est aujourd’hui le seul secteur créateur net d’emplois dans les PDEM, ce qui signifie que les créations y sont supérieures aux destructions.

Ainsi entre 1974 et 1991 les effectifs tertiaires ont augmenté de 44% aux EU, de 30% au Japon, de 23% en France et de 15% en Allemagne.

+ La tertiarisation est un phénomène ancien, mais qui s’est accéléré pendant les 30 glorieuses. Elle s’explique par le passage à une société de consommation de masse avec progression des activités marchandes (commerces, tourisme, hôtellerie, services aux particuliers, services financiers). Elle s’explique aussi par la concentration des entreprises qui ont alors multiplié leurs services (administratifs, comptables, marketing, communication). Et surtout elle s’explique par la montée de l’Etat-providence responsable de la création de nombreux secteurs (fonction publique, éducation, secteur sanitaire et social).

+ Mais ce sont des emplois tertiaires différents d’un pays à l’autre : ils sont plus qualifiés en Europe alors qu’ils le sont moins aux EU où ils sont mal payés, peu valorisants et précaires (ex : les petits boulots de services aux particuliers). Ce sont au contraire plutôt des services commerciaux, financiers et surtout publics en France.

3- La salarisation

+ Les salariés représentent une majorité de la population active occupée. C’est aux EU qu’ils sont le plus représentés : 91,8% en 1989 et au Japon les moins nombreux : 75,5% à la même date. La salarisation est liée à la tertiarisation de l’économie, mais aussi à la crise qui détruit beaucoup d’emplois indépendants dans le commerce, l’agriculture et l’industrie. En France les emplois non salariés sont passés de 6,5 millions en 1955 à 2,5 millions seulement en 1995 soit près de 3 fois moins.

+ Cependant on constate aussi qu’en période de crise, l’emploi non salarié est considéré comme un refuge temporaire de la main d’œuvre ou comme une nouvelle façon de s’insérer sur le marché du travail. En France les aides à la création d’entreprises ont ainsi poussé de nombreux chômeurs à s’installer à leur compte, on les appelle des « self employed » (ex : les artisans, les métiers du bâtiment). Mais leur situation est très fragile car le taux de mortalité des entreprises individuelles est de 50% après 2 ans. On remarque pourtant que dans les années 80 ce sont les PME qui ont le plus augmenté leurs effectifs : les PME ont servi d’amortisseur de crise. Ainsi, en 1975 43,0% des salariés travaillaient dans des entreprises de <50 salariés, il y en avait 54,8% en 1995 soit une progression de 12% (environ ¼ de plus), contre respectivement 67% et 45,2% dans des entreprises de >50 salariés.

4- La qualification

+ Le niveau de qualification de la population active augmente dans l’ensemble des PDEM. En France en 1975 56,4% de la population active n’avait aucun diplôme ou seulement le CEP, contre 6,5% ayant le brevet, 19,4% un CAP ou un BEP, et 17,6% ayant un diplôme égal ou supérieur au Bac. En 1995, il n’y a plus que 28,9% de la PA qui n’a aucun diplôme ou le CEP seulement, contre 7,8% qui a le brevet, 29,8% un CAP ou un BEP, et 33,5% qui a au moins le Bac. Il y a donc en 20 ans 2 fois plus de bacheliers et diplômés de l’enseignement supérieur dans la population active et 1,5 fois plus de titulaires d’un CAP ou d’un BEP.

Cette évolution peut s’expliquer par l’allongement de la durée de la scolarisation et sa généralisation à toutes les CSP. Mais l’obtention d’un diplôme est surtout vue aujourd’hui comme une protection contre le chômage. De plus les secteurs secondaire et tertiaire réclament une main d’œuvre de plus en plus qualifiée du fait du progrès technique.

Conclusion partielle (transparent)

+ Le marché du travail est donc le lieu où se rencontrent l’offre et la demande de travail (transparent). Tandis que l’offre dépend de déterminants démographiques (accroissement naturel, flux migratoires) et socioculturels (scolarisation, retraite, comportement des femmes) la demande dépend de données conjoncturelles (consommation, investissement, exportations) et de données structurelles (progrès technique, productivité, durée du travail).

De l’inadéquation entre offre et demande de travail naît un déséquilibre qui est le chômage.

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II - Le chômage                                                                             

Définitions

+ Selon le BIT il faut remplir 4 conditions pour appartenir à la PSERE :

* être à la recherche d’un emploi

* accomplir effectivement des démarches de recherche

* être disponible pour prendre un emploi éventuel

* n’avoir eu aucune autre occupation professionnelle au cours de la semaine de référence

Depuis 1995 la France a reconnu cette définition et harmonisé son calcul du chômage avec les autres pays (l’ANPE ne retenait que les 3 1° conditions pour définir les DEFM)

Le taux de chômage= (PSERE/PA) x 100

A/ L’évolution du chômage                                                          

1- Dans les PDEM

+ Le chômage augmente dans tous les PDEM depuis 1973, mais c’est en Europe qu’il augmente le plus et qu’il est le plus important. En 1997 c’est en Europe que les taux de chômage étaient les plus élevés (12,5% en France, 12,3% en Italie, 7,7% en Allemagne et 7% au Royaume Uni), contre seulement 5% aux Etats-Unis et 3,5% au Japon.

+ Les catégories les plus touchées sont les jeunes et les femmes auxquelles il convient d’ajouter les moins diplômés. C’est en Italie et en France que le chômage des jeunes et des femmes sont les plus élevés en 1997 (respectivement 33,6% et 16,8% en Italie et 28,1% et 14,2% en France), et au japon les plus faibles (respectivement 6,6% et 3,6%).

+ Le chômage s’allonge également dans les PDEM et touche désormais tous les pays sans exception : le chômage de longue durée (supérieur à 12 mois) concerne 8,7% des chômeurs aux EU et 66,3% en Italie en 1997, mais ce sont les tranches d’âge mûr qui sont les plus concernées par celui-ci.

+ Enfin plus le niveau d’études et plus la qualification augmentent et plus le taux de chômage diminue. Cette corrélation inverse montre donc que le diplôme constitue aujourd’hui un rempart contre le chômage.

2- En France

+ Depuis 1973 le chômage augmente fortement en France : il est passé de 1million en 1974 à 2millions en 1981, 2,5millions en 1988 et 3millions en 1992. Après l’harmonisation de 1995 le nombre de chômeurs est retombé au-dessous de la barre des 3millions mais il dépasse à nouveau ce chiffre à partir de 1996.

On remarque que le nombre de chômeurs augmente à la fois du fait que l’offre de travail (PAT) augmente de façon soutenue et aussi parce que la demande (PAO=emploi) est quasi stagnante depuis 1974 : l’emploi n’a progressé que de 4,5% entre 1974 et 1997 contre +10% de 1950 à 1974 soit 2 fois moins sur la période la plus récente.

+ En France les catégories les plus exposées sont les mêmes que dans les autres PDEM : les jeunes, les femmes et les moins diplômés et les écarts se creusent : en 1996 29% des femmes actives de moins de 25ans étaient au chômage contre 10% seulement en 1974. Les diplômés de l’enseignement supérieur sont 2 fois moins touchés par le chômage que les non diplômés (7,4% contre 15,4% en 1996), mais les cadres sont 3 fois moins touchés que les employés et les ouvriers (4,6% contre 15,3%). L’ancienneté au chômage augmente aussi fortement depuis 1975 : de 6,7 mois en moyenne elle est passée à 15,2 mois en 1996, soit plus de 2 fois plus.

+ Depuis la crise les différentes inégalités face au chômage se sont renforcées, mais si les jeunes sont les plus vulnérables, c’est-à-dire ont le plus de risques de devenir chômeurs, ils ont aussi plus de capacités à en sortir que les plus âgés. Ce sont les plus de 50ans qui forment le noyau dur des chômeurs de longue durée (60% des hommes de 50 ans et plus en 1996). Les moins qualifiés sont à la fois les plus vulnérables et ceux qui ont le moins de capacités à sortir du chômage, d’où leur exclusion. On dit que leur employabilité est des plus faible et celle-ci diminue au fur et à mesure que la durée du chômage augmente.

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B/ L’analyse du chômage                                                            

1- Les différentes typologies

+ Selon J. FREYSSINET on distingue :

* le chômage de conversion qui est dû aux changements technologiques, ainsi qu’aux restructurations et aux redéploiements. Il affecte les hommes adultes et qualifiés, mais il est bien indemnisé et dure peu longtemps.

* le chômage répétitif est quant à lui dû aux stratégies des entreprises qui embauchent en fonction de la conjoncture. Il affecte plutôt les jeunes et les femmes peu qualifiés. Sa durée peut être plus ou moins courte mais il se répète souvent et n’est pas très bien indemnisé.

* le chômage d’exclusion est dû à la sélectivité des employeurs. Il affecte surtout les plus âgés et les plus jeunes sans qualifications. Il est de longue durée et donc non indemnisé.

+ Selon les écoles de la pensée économique on distingue encore :

le chômage volontaire dû selon les monétaristes néo-libéraux à l’exigence des chômeurs eux-mêmes qui cherchent un emploi pour lequel ils n’ont pas les qualifications requises ou qui veulent obtenir une rémunération plus élevée que celle que peut leur offrir le marché du travail.

* le chômage frictionnel lié à la durée de temps de recherche et de passage d’un emploi à un autre. C’est un chômage incompressible, c’est-à-dire qu’il existe toujours, mais il est plus ou moins long selon la conjoncture.

* le chômage structurel dû selon les libéraux français qui reconnaissent aussi le chômage frictionnel, aux évolutions de l’emploi par région, par qualification, par secteur...

* le chômage conjoncturel enfin, dû, selon les Keynésiens à l’insuffisance de la Demande en période de crise.

+ Enfin et d'une manière générale on distingue:

*le chômage classique selon lequel l'offre de travail est supérieure à la demande de travail, ce qui est dû à une demande de travail insuffisante du fait d'un coût du travail trop élevé.

*le chômage Keynésien selon lequel l'offre de biens et services est supérieure à la demande, ce qui est dû à une demande de consommation insuffisante du fait de revenus trop faibles.

 

2- Les causes du chômage

+ D’après ces typologies on constate que les causes du chômage sont multiples. On peut en récapituler quatre :

* la conjoncture est la principale qui agit aussi sur toutes les autres. C’est en effet le niveau de l’activité économique dépendant de la consommation et de l’investissement, qui détermine le recrutement des entreprises.

* le comportement de la population active (l’offre de travail) peut aussi être un facteur du chômage, du fait de ses fluctuations. Ainsi le taux de flexion conjoncturel montre comment une augmentation du nombre d’emplois ne réduit pas d’autant le nombre de chômeurs car la proximité d'emplois nouveaux peut pousser certains inactifs à rechercher un emploi (ex : les femmes).

taux de flexion = (nombre de chômeurs en moins / nombre d’emplois créés) x 100. Ce taux est proche de 70% en France, ce qui signifie qu’il faut créer 100 emplois supplémentaires pour diminuer le nombre de chômeurs de 70.

* la stratégie des entrepreneurs qui substituent le capital au travail du fait de l’évolution du coût de ce dernier, et qui se montrent de plus en plus difficiles, même si les emplois offerts ne sont pas très qualifiés. De plus les firmes conservent des réserves de productivité, ce qui leur permet de ne pas offrir d’emplois supplémentaires, même si l’activité repart. Ainsi la loi d’OKUN explique que «lorsque la production croît, l’emploi ne croît pas dans les mêmes proportions car on préfère augmenter d’abord la productivité du travail ». On parle encore d’hystérésis pour dire que le chômage persiste, alors que ses causes objectives ont disparu.

* Enfin, selon M. PIORE et P. DOERINGER, il existe une segmentation du marché du travail avec plusieurs sous-marchés : un marché central où les emplois offerts sont stables, qualifiés et bien rémunérés ; et un marché périphérique ou secondaire où les emplois sont précaires, peu qualifiés et mal rémunérés. C’est sur ce dernier que le chômage sévit le plus et où l’économie souterraine recrute (travail au noir, activités illicites...). Il concerne plutôt les femmes, les jeunes et les personnes peu qualifiées. On parle alors d’un dualisme du marché du travail.

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C/ La lutte contre le chômage                                                

1- Les positions théoriques

+ On trouve 2 grandes explications théoriques du chômage qui vont conditionner 2 types de politiques :

* pour l’école libérale le chômage est classique (O>D) dû aux rigidités du marché du travail. En effet l’action de l’Etat et des syndicats entrave la liberté du marché en imposant des salaires et un coin fiscal trop élevés (ex : le SMIC en France) ainsi qu' une indemnisation du chômage (ex : les ASSEDIC en France). Seules leur suppression peut rétablir l’équilibre entre offre et demande de travail, grâce à la baisse des salaires qui va permettre au marché du travail de retrouver l’équilibre(cf. schéma 1).

* pour l’école keynésienne, le chômage est Keynésien ou conjoncturel, et seule son indemnisation permet de ne pas entraîner l’économie dans une spirale à la baisse, par diminution de la Demande effective du fait de celle du pouvoir d’achat. En effet, pour eux le niveau de l’activité et de la production est fixé par les entrepreneurs qui anticipent l’évolution de la demande de consommation afin d’investir en conséquence, c’est la Demande effective. Il faut donc augmenter les salaires pour augmenter la consommation, seule susceptible de faire repartir la croissance (cf. schéma 2).

* E. MALINVAUD a bâti une théorie dite du déséquilibre, en montrant (cf. schéma 3) qu’il pouvait y avoir à la fois un chômage classique (si O>D sur le marché du travail et O<D sur le marché des biens), et un chômage Keynésien (si O>D sur les 2 marchés) dépendant des marchés considérés.

2- Les politiques de l’emploi

On distingue des politiques actives et des politiques passives :

+ les politiques actives cherchent à rétablir une dynamique de l’offre sur le marché des biens et services :

* pour les libéraux celles-ci passent par une réduction des salaires ou des charges sociales afin de rétablir les profits des entreprises. Elles sont résumées dans le théorème d’H. SCHMIDT «les profits d’aujourd’hui sont les investissements de demain et les emplois d’après-demain » (ex : en France les charges sociales ont baissé depuis la fin des années 80).

* pour les keynésiens il faut agir sur la demande effective par une hausse du pouvoir d’achat, qu’il s’agisse d’augmenter les salaires nominaux ou les prestations sociales. On parle alors d’une relance par la demande (ex : en France les prestations sociales ont été augmentées après 1981).

* selon M. WEITZMAN, seul un partage du travail peut aujourd’hui diminuer durablement le chômage, selon la formule «travailler moins pour travailler tous » (ex : en France la loi sur les 35 heures qui s'est appliquée au 1° janvier 2000 pour les entreprises de +20 salariés, pas de réduction de salaires sur le SMIC, l’Etat aide les entreprises à condition que des emplois soient créés ou sauvés).

+ les politiques passives cherchent plutôt à accompagner le chômage par des mesures sociales : indemnisations, stages de qualification, insertion des chômeurs, formation...

Dans les PDEM cette politique ne fait pas l’unanimité :

* les pays anglo-saxons (ex : EU et RU) ainsi que le Japon sont plus libéraux et ce sont les salaires qui ajustent l’emploi en diminuant quand le chômage est élevé, l’accompagnement social y est quasi inexistant (pas d’indemnisation ni de formation).

* au contraire les pays européens ont un accompagnement du chômage plus important si bien que l’importance du chômage contribue à alourdir les charges pesant sur le budget social (ex : en France).

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III - Les nouvelles formes d’emploi

Face à la crise, entreprises et salariés cherchent à s’adapter. Les nouvelles formes d’emploi et la nouvelle organisation du travail sont alors les résultantes des conditions actuelles du marché du travail.

A/ Les FPE                                                                                

Ce sont des emplois atypiques, qui s’opposent à la norme en matière d’emploi qui est celle du temps complet et de la durée indéterminée.

1- Les différentes catégories

+ Les emplois précaires traduisent une moindre intégration des salariés dans l’entreprise. On trouve :

* les CDD correspondant à des emplois temporaires, car les entreprises embauchent selon la conjoncture et leurs besoins pour 3 à 6 mois.

* les emplois intérimaires correspondent à des emplois de remplacement de plus courte durée, de 1 jour à 3 mois maximum. Dans ce cas l’entreprise fait appel à des entreprises spécialisées dans ce genre de sous-traitance.

* les emplois à temps partiel sont plus souvent choisis librement par des femmes cherchant à concilier vie familiale et vie professionnelle. Cependant de plus en plus d’entreprises recrutent à temps partiel une main d’œuvre féminine qui n’a pas d’autre choix (ex : caissières, infirmières, personnels de service...). C’est aussi parfois un recours pour des entreprises en difficulté qui n’ont pas d’autre choix que de mettre leurs salariés à temps partiel plutôt que de licencier.

* l’apprentissage est une situation ambivalente entre formation et emploi : 3 semaines de travail/ 1 semaine de cours. Il dure 2 ans maximum et concerne les jeunes.

* les stages enfin correspondent à une formation, mais ils sont le plus souvent une forme de chômage déguisé.

2- Leur évolution en France

+ Dans tous les PDEM les emplois précaires ont augmenté depuis la crise et en France particulièrement : ils représentent 4,6 millions d’emplois en 1997 soit 20,4% de la population active occupée.

Ce sont surtout les CDD, contrats aidés et stages qui ont augmenté (x 2,7 entre 1985 et 1997), l’interim a aussi progressé (x 2,9 entre les mêmes dates) ainsi que les CDI à temps partiel (x1,5) et l’apprentissage (x1,2).

Les emplois précaires sont intéressants à la fois pour les entreprises qui y trouvent une forme d’emploi souple, et pour les travailleurs qui souvent n’ont pas d’autre choix que le chômage. Ils concernent surtout les femmes et les jeunes. Cependant ces emplois débouchent rarement sur une véritable stabilité. Pour les jeunes, elles sont pourtant une possibilité d’avoir un premier contact professionnel, pour les autres celle d’accroître leur formation. Mais ce sont souvent des formes de chômage déguisé et qui débouchent sur du chômage répétitif en augmentant le dualisme du marché du travail

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B/ La Flexibilité                                                                            

En fait la précarité est une réponse aux besoins de flexibilité des entreprises.

1- Les différentes formes de flexibilité

+ Selon B. BRUNHES on en distingue 5 :

* la flexibilité quantitative externe qui cherche à faire varier la quantité de travail c’est-à-dire les effectifs (ex : CDD+ mobilité géographique et professionnelle)

* la flexibilité quantitative interne qui consiste à moduler le temps de travail en conservant le même volume de main d’œuvre (ex : temps partiel, heures sup.)

* l’externalisation qui est le recours à la sous-traitance en matière de main d’œuvre (ex : interim, recours aux travailleurs indépendants sur les chantiers) ou de production (PME satellites).

* la flexibilité fonctionnelle qui nécessite la polyvalence des travailleurs et donc une plus grande qualification de ceux-ci (ex des ateliers flexibles).

* la flexibilité salariale qui consiste à moduler les rémunérations en fonction de la conjoncture (ex : primes, baisse des salaires).

2- La flexibilité en France

+ Tous les PDEM ont désormais recours à la flexibilité mais, alors que les pays scandinaves et l’Allemagne ont plutôt recours à la flexibilité fonctionnelle, les pays anglo-saxons ont plutôt choisi la flexibilité quantitative externe et la flexibilité salariale. Il en est de même pour la France. Ce choix permet de faire l’économie d’une formation de la main d’œuvre, mais il accroît la précarisation de l’emploi et le dualisme du marché du travail. En France, on peut dire que la situation est semi-rigide car le secteur public est encore abrité du chômage, alors que la précarité s’accroît dans le secteur privé. La flexibilité salariale ne concerne pas encore secteur public, alors qu’elle s’est généralisée dans le secteur privé à l’exemple des pays anglo-saxons.

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C/ Les nouvelles formes d’organisation du travail              

Elles répondent à la fois aux besoins de flexibilité fonctionnelle des entreprises et à l’attente des travailleurs pour une plus grande qualification. Elles sont aussi la conséquence des différentes crises qu’ont traversé les anciennes organisations du travail.

1- Les deux crises du taylorisme

+ Le taylorisme avait été théorisé à la fin du XIX° siècle par F.W.TAYLOR qui préconisait une division du travail à double niveau : verticalement entre le la conception et l’exécution, et horizontalement pour le travail d’exécution en une multitude de tâches parcellaires.

En faisant passer les chaînes de montage devant les travailleurs fixés à leurs postes, H. FORD a parachevé le travail de TAYLOR et inventé le travail à la chaîne.

Mais ce modèle importé en Europe et au Japon après la 2° GM est entré en crise au début des années 70, les travailleurs lui reprochant leur abrutissement et leur aliénation aux machines. Cette crise s’est traduite alors par une augmentation de l’absentéisme, du turn over, des malfaçons et actes de sabotages et des grèves.

La montée du chômage au début des années 80 a obligé les travailleurs à faire des concessions tandis que les entreprises substituaient de plus en plus le capital au travail. Désormais les OS sont aussi mis au rebut et les ouvriers forcés de se qualifier pour retrouver un emploi.

2- Les nouvelles méthodes de travail

+ Les entreprises ont cherché à motiver les travailleurs en répondant à leurs demandes par :

* l’élargissement et l’enrichissement des tâches qui regroupent ainsi plusieurs opérations, ce qui varie le travail d’exécution.

* les groupes semi-autonomes ou îlots de travail regroupent quelques travailleurs qui peuvent organiser leur travail et permuter sur les postes, ce qui leur donne une plus grande liberté et plus de responsabilité.

* les ateliers flexibles font appel à la polyvalence des travailleurs qui passent ainsi d’une activité à une autre selon les besoins de conjoncture.

* les cercles qualité ou groupes zéro défaut redonnent la réflexion aux travailleurs sur des problèmes de qualité ou de productivité.

Les 2 premières méthodes suivent le modèle suédois, les 2 autres le modèle japonais, tous réputés pour leurs faibles taux de chômage. Entre les deux, la France a du mal à choisir et les réformes restent timides dans les entreprises françaises.

+ Les nouvelles technologies permettent aujourd’hui de travailler autrement :

* l’automatisation des chaînes de montage a supprimé les postes de travail à la chaîne et donné aux travailleurs un rôle de surveillance et de maintenance, ce qui leur donne une plus grande qualification.

* l’informatisation a fait apparaître le télétravail qui, par certains côté ressemble à l’ancien domestic system. Les télé travailleurs reliés par le réseau informatique ne se déplacent plus au bureau et travaillent à leur domicile. De même pour les télé prospecteurs.

+ Au Japon enfin, est apparue une nouvelle organisation du travail : le Toyotisme. Inventé par l’ingénieur Taïchi OHNO, il repose sur plusieurs méthodes :

* la production «juste à temps » ou «à flux tendus », qui permet d’éliminer les stocks et les temps morts car chaque composant, fabriqué par un sous-traitant arrive à la ligne d’assemblage au dernier moment et en quantités voulues pour s’intégrer au produit en cours de fabrication.

* la méthode du «kanban » qui met tous les postes de travail en interaction (modèle de coordination) pour éviter les gaspillages et accroître la productivité au maximum, car c’est l’aval qui commande à l’amont ( c'est la demande qui commande à la production).

* le concept du «kaizen » enfin, qui repose sur une amélioration permanente pour atteindre la Qualité Totale, c’est-à-dire les 5 zéros : 0 défaut, 0 panne, 0 stock, 0papier, 0 délai.

Selon l’économiste Masahito AOKI, le système japonais a aujourd’hui dépassé le système américain. Le modèle hiérarchique hérité de TAYLOR et de FORD est remplacé par un modèle beaucoup plus efficace : le modèle de coordination basé sur le partage de l’expérience acquise et l’adaptation permanente (petites innovations).

Conclusion: les enjeux de la qualification

+ L’augmentation de la qualification est un investissement pour l’avenir, comme le montre la théorie du «capital humain »de G. BECKER. Même si la qualification individuelle ne se traduit pas toujours par une meilleure rémunération, elle reste un enrichissement pour tout pays considéré, qui pourra ainsi améliorer sa productivité.

En France, on considère que la population active est passé d’une forme «en pyramide » à une forme «en diamant » car selon l’INSEE

en 1982 on trouvait dans les entreprises françaises et l’on prévoyait pour 2000

17%                                         d’ingénieurs et                                          30%

                                                      techniciens

38%                                        de contremaîtres                                       45%

                                               et d’ouvriers qualifiés

45%                                           d’ouvriers non                                         25%

                                                       qualifiés

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Mme SODAIGUI, professeur de Sciences Economiques et Sociales