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Chapitre 2: La production

 

PLAN

(Cliquez sur un titre pour vous y reporter)

Introduction

 I - Les mutations techniques

A/ Le progrès technique

1-Invention et innovation

2-Le rôle du progrès technique

3-L’analyse du progrès technique

4-Progrès technique et emploi

B/ L’investissement

1-Evolutions dans les PDEM

2-Les déterminants de l’investissement

3-Le financement de l’investissement

L4-’investissement dans l’analyse économique

II - L’évolution des structures productives

B/La productivité

1-La mesure de la productivité

2-Evolution

3-L’analyse de la productivité

B/Les mutations sectorielles

1-Evolution de la structure de la 2-production

Evolution des secteurs d’activité

C/ La concentration des entreprises

1-Les modalités de la concentration

2-L’analyse de la concentration

3-La stratégie des entrepreneurs

Conclusion

Introduction

+ L’appareil productif d’un pays est constitué par l’ensemble des unités de production marchandes de ce pays. Il est formé par les entreprises considérées à la fois sous un angle juridique, technique et humain.

+ Depuis la Révolution industrielle, les mutations ont été considérables dans les unités de production des PDEM. Nous allons étudier d’abord les aspects techniques, avant d’aborder les mutations de la structure productive.

  I -  Les mutations techniques

A l’origine des mutations techniques on trouve le progrès technique, puis des investissements sont ensuite nécessaires pour le mettre en œuvre.

  A/  Le progrès technique                                                            

1- invention et innovation

+ A la base de toute innovation, il y a une invention. L’innovation est en effet l’application réussie d’une invention au domaine industriel. Mais, pour que l’invention soit appliquée, il faut qu’une entreprise y trouve un intérêt, c’est-à-dire que les perspectives de profit l’emportent sur la désorganisation que suppose la mise en place de l’innovation (ex : la mise en place d’appareil automatisé remet en cause l’organisation du travail antérieure). De plus, l’innovation doit répondre à un besoin, c’est-à-dire que les débouchés soient suffisants. On peut donc dire que l’innovation ne doit pas aller à l’encontre des intérêts de l’entreprise innovatrice. Rentabilité et débouchés sont les critères de la décision d’appliquer une invention ou pas.

+ Ainsi, de nombreux brevets d’invention sont déposés chaque année ou achetés, sans donner lieu à une application industrielle. Les entreprises ont aussi parfois intérêt à ce qu’une innovation ne se produise pas pour ne pas détruire leur position dominante sur un marché. Elles vont alors l’acheter afin d’empêcher d’autres entreprises de l’exploiter, ce qui s’appelle de la rétention.

+ On peut aussi distinguer les innovations radicales et les innovations incrémentales ou « petites innovations ». Ces dernières sont en fait des améliorations apportées à un produit ou à un procédé grâce à la pratique (« learning by doing ») ou grâce aux échanges d’information entre les utilisateurs (« learning by interacting »).

2- Le rôle du progrès technique

+ Le progrès technique peut être la mise au point d’un nouveau produit ou d’un nouveau procédé de fabrication, on parle de progrès de produit dans le premier cas et de progrès de processus dans le second. Son but est alors de répondre à un besoin permettant de trouver de nouveaux débouchés, ou d’obtenir des gains de productivité qui permettront de réduire les coûts de production, etc.

Il faut donc aussi distinguer progrès technique et innovation : l’innovation est un progrès technique qui a atteint le stade de la production et de la commercialisation.

On peut décomposer la Recherche-développement en 3 étapes :

Recherche fondamentale qui débouche sur des découvertes (propriétés)

Recherche appliquée ; ; ; ; du progrès technique (brevet)

Développement ; ; ; ; des innovations (réussite)

Après la période de R-D il y a encore 3 étapes. Le cycle de vie de l’innovation (transparent 1) montre comment évoluent le profit et le marché à chaque étape : en phase de croissance le produit apparaît sur le marché, très peu de firmes le commercialisent, le marché est monopolistique ou oligopolistique, les prix sont élevés et les profits aussi. C’est la phase la plus intéressante car ensuite il y a concurrence, ce qui fait baisser les prix en phase de maturité, les profits diminuent donc aussi. En phase de déclin la banalisation de la technique a enlevé tout avantage à ses inventeurs, si bien que les entreprises ont intérêt à sortir sans cesse de nouveaux produits.

+ Le progrès technique est la seule source du progrès matériel de l’humanité : il a permis que de nouveaux procédés, de nouveaux équipements apparaissent pour mieux satisfaire nos besoins tout en travaillant moins longtemps et moins durement. Il est aussi devenu indispensable dans la compétition que se livrent les entreprises sur le marché, et les nations sur la scène internationale. C’est pourquoi dans tous les pays la recherche fait l’objet d’une politique mise en œuvre par les pouvoirs publics. Ainsi les PDEM y consacrent entre 2 et 3% de leur PIB, et l’évolution est à la hausse depuis 30 ans. Mais seuls les E-U arrivent à financer des projets géants grâce à leur taille(ex : le programme Apollo). Ils associent aussi recherche publique et recherche privée, car les Universités sont financées par des entreprises privées. La France est desservie par sa petite taille et son cloisonnement, car le secteur public, représenté par le CNRS n’a que très peu de liens avec les entreprises privées (exception de la recherche pharmaceutique). Le Japon est plus efficace grâce à l’intervention du MITI qui sélectionne les entreprises et les Universités et les oblige à coopérer en leur donnant la direction vers laquelle ils doivent orienter leurs recherches. C’est dans ce pays que les cycles technologiques sont les plus courts, ce qui signifie qu’il sort plus rapidement de nouveaux produits que les autres pays.

3- L’analyse du progrès technique

+ Pour les néoclassiques (J.J. CARRE, C. DUBOIS, E. MALINVAUD) le progrès technique est un résidu qui permet d’expliquer la proportion de la croissance qui ne provient ni de la quantité du facteur travail ni de celle du facteur capital qui sont mis en œuvre. Il serait alors responsable d’une croissance exogène. Mais pour les néolibéraux de la NEC (R. LUCAS, P. ROMER) ce résidu serait plutôt incorporé aux facteurs de production les rendant ainsi plus performants (ex : formation de la main d’œuvre). Ils parlent alors d’une croissance endogène.

+ J. A. SCHUMPETER fait du progrès technique concrétisé dans l’innovation l’un des principaux moteurs de la croissance économique. Il distingue 5 types d’innovations : de produit (ex : l’automobile), de procédé (ex : l’aviation à réaction), de composants (ex : le lycra), de marchés (ex : la Chine), d’organisation (ex : le taylorisme). Il a montré comment, au cours de l’histoire, les innovations sont apparues en grappes et ont impulsé des révolutions industrielles (transparent 2). SCHUMPETER a ainsi montré que le progrès technique était responsable de la dynamique des cycles économiques, et en particulier des cycles KONDRATIEFF, grâce au processus de destruction créatrice qui « renouvelle l’ancien et fait émerger le neuf ».

+ L’école de la régulation (M. AGLIETTA, R. BOYER) a surtout insisté sur le rôle du progrès technique dans le mode de production fordiste, montrant le cercle vertueux enclenché par les gains de productivité : augmentation des profits et des investissements, des salaires et du pouvoir d’achat, baisse des prix et consommation de masse.

4- Le progrès technique et l’emploi

+ Le sens commun associe souvent progrès technique et chômage, mais A. SAUVY montre qu’au cours de l’histoire, les machines ont créé beaucoup plus d’emplois qu’elles n’en ont détruit. Sa théorie de la compensation montre en effet que le progrès technique de processus a pour but de réaliser des économies en supprimant des emplois, mais, selon lui, il y a un effet de diffusion des gains de productivité ainsi réalisés qui se produit. C’est ainsi que des emplois de compensation sont créés soit directement dans la fabrication de ces nouveaux équipements, soit indirectement du fait de la baisse des prix. En effet la demande de biens se met alors à croître dans la branche où les gains de productivité se sont produit, du fait de la baisse des prix, mais aussi dans d’autres branches à cause de la hausse générale du pouvoir d’achat. Enfin, on constate une diminution de la durée du travail qui profite au secteur des loisirs, ce qui créé de nouveaux marchés. C’est ainsi que dans les PDEM la durée annuelle du travail a diminué de moitié environ depuis un siècle (en France la durée hebdomadaire était de 48heures en 1919, elle sera de 35 heures au 01/01/2000).

+ La théorie de la compensation d’A. SAUVY est vérifiable sur le long terme car les périodes de croissance comme la RI ou les 30 glorieuses sont celles qui ont le plus créé et utilisé de progrès technique ; ce sont aussi celles où le plus grand nombre d’emplois ont été créés. Aujourd’hui de même, ce sont les pays comme le Japon qui mettent le plus en œuvre de progrès technique et qui créent le plus d’emplois.

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  B/ L’investissement                                                                

+ Définitions : L’investissement désigne un achat utile à la production à long terme. Les critères de définition sont donc la durée et l’utilisation. On distingue les investissements matériels (bâtiments, machines, etc.) et les investissements immatériels (R-D, marketing publicité, logiciels, formation de la main d’œuvre). L’investissement peut être de remplacement, pour remplacer un matériel usé ou obsolète, de capacité, pour augmenter la capacité de production, ou de modernisation, pour augmenter la productivité de l’entreprise. Son effet sur l’emploi peut alors être nul, positif ou négatif.

1- Evolution dans les PDEM

+ Dans l’ensemble des PDEM l’investissement s’établit dans une fourchette allant de 15 à 25% du PIB. Seul le Japon a un niveau d’investissement supérieur : autour de 30% de son PIB. Ce sont les E-U et le R-U qui ont le plus faible niveau d’investissement, puisqu’il ne dépasse jamais 20% de leur PIB ; cependant les E-U bénéficient d’un effet de taille du fait d’un PIB beaucoup plus important. On remarque que globalement il s’est produit une baisse des investissements à partir du début des années 70 (la crise) alors qu’il avait augmenté au contraire au cours de la période précédente (30 glorieuses).

+ Si l’investissement diminue, il change aussi de nature depuis 30 ans : on remarque en effet que de 1985 à 1994 la part des investissements matériels se réduit au profit des investissements immatériels. Cependant les investissements matériels restent encore dominants dans l’investissement total dont ils représentent environ les 2/3 soit 2 fois plus que les investissements immatériels. Parmi ces derniers ce sont les dépenses de publicité marketing qui pèsent le plus lourd : 40% en 1994 soit 2 fois + qu’en 1985.

2- Les déterminants de l’investissement

+ La décision d’investir dépend de 3 critères : les profits escomptés, les débouchés anticipés, la rentabilité financière. Le profit est le premier déterminant de l’investissement car sans profits pas de moyens pour le financement interne (l’autofinancement) et pas d’attrait pour le financement externe (Bourse ou banque). Les débouchés sont essentiels également, ils sont anticipés par l’entrepreneur, c’est un pari sur la croissance future. L’entrepreneur n’investira que s’il pense que sa production se vendra.

+ Enfin la rentabilité financière doit être prise en compte. Il s’agit de faire la comparaison entre la rentabilité économique (EBE/ capital investi) et les taux d’intérêt du marché. La rentabilité financière= (EBE-frais financiers) / (capital investi- dettes).

K. WICKSELL (école suédoise) a montré qu’il pouvait se produire un effet de levier si la rentabilité économique était supérieure au coût du capital emprunté, car celui-ci générait ainsi un profit supplémentaire. A contrario si le coût de l’emprunt dépasse la rentabilité économique c’est un coup de massue qui se produit, n’incitant pas les entrepreneurs à investir et les poussant au contraire à se désendetter (ex : dans les années 80 et au début des années 90).

3- Le financement de l’investissement

L’entreprise a en effet plusieurs possibilités pour financer ses investissements : par financement interne, par appel aux marchés financiers ou par recours au crédit bancaire.

+ Le financement interne provient de l’autofinancement, c’est un financement propre à l’entreprise qui utilise alors les amortissements, c’est-à-dire l’épargne de l’entreprise. C’est le plus intéressant car il ne supporte aucun coût (intérêt) ni charge (impôt).

L’appel aux marchés financiers consiste à solliciter l’épargne des autres agents économiques. C’est un financement externe direct, qui s’effectue par la vente de titres (actions ou obligations) en bourse. Il est peu coûteux car il n’y a pas d’intermédiaires, mais il est contraignant car il exige que les entreprises se soumettent au contrôle de la COB. Il peut aussi être dangereux lorsque les marchés financiers sont instables (ex : en cas de Krach).

Le recours au crédit bancaire est un financement externe indirect, qui s’effectue par l’intermédiaire des banques. C’est le plus coûteux car il est soumis aux fluctuations des taux d’intérêt.

+ Dans les années 80, avec la hausse vertigineuse des taux d’intérêt, on est passé d’une économie d’endettement dominée par les banques, à une économie de marchés financiers dominée par la Bourse. Aujourd’hui, la baisse des taux d’intérêt redonne de l’importance aux banques, d’autant plus que les marchés financiers ont montré leurs faiblesses (Krach de 1987, crise asiatique, etc.).

4- L’investissement dans l’analyse économique

Deux théories s’affrontent dans leur façon de concevoir la mise en œuvre de l’investissement.

+ Selon la théorie néoclassique l’investissement est égal à l’épargne. C’est un équilibre ex ante, ce qui signifie que seule une épargne suffisante permet d’investir. Cet équilibre s’effectue sur le marché du capital dont le prix est représenté par le taux d’intérêt (schéma) : pour les épargnants le taux d’intérêt doit être le plus élevé possible, pour les investisseurs le plus bas possible, l’équilibre s’effectue grâce aux fluctuations du taux d’intérêt.

+ Selon la théorie keynésienne l’investissement a un rôle fondamental dans un circuit macroéconomique (transparent) : c’est le niveau de la demande effective qui détermine le niveau de la production et par conséquent le niveau de l’emploi.

Le principe de la demande effective repose à la fois sur un effet d’anticipation et sur un effet multiplicateur. En effet, selon Keynes les entrepreneurs anticipent l’évolution de la consommation pour mettre en œuvre les investissements destinés à une production correspondant à ces perspectives : « c’est un pari sur le futur ». De plus, lorsque l’investissement augmente, il se produit des répercussions au niveau des revenus distribués (salaires, profits), si bien que si la propension à consommer ne change pas, une augmentation de l’investissement permet d’augmenter à la fois la consommation et l’épargne (schéma). En fin de compte l’épargne égalise l’investissement, mais c’est un équilibre ex post. Pour les keynésiens il n’est donc pas nécessaire qu’il y ait une épargne préalable pour investir, car on peut recourir au crédit bancaire, ce qu’il faut surtout c’est une demande de consommation suffisante.

D I     =>        D Y    =>                     D D

                                    +

                                                D E

 

  D I =S D         ( =

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 II -   L’évolution des structures productives

L’investissement a pour effet d’augmenter la productivité des facteurs, mais son accumulation augmente aussi la taille des entreprises.

  A/  La productivité                                                                

1- La mesure de la productivité

+ La productivité mesure le rapport des quantités produites aux moyens mis en œuvre pour produire : Productivité= Production / facteurs de production.

La productivité apparente donne une mesure plus fine car on remplace alors la production par la valeur ajoutée : Productivité apparente= Valeur ajoutée / facteurs de production.

La productivité moyenne mesure la quantité produite par unité de facteur utilisé, tandis que la productivité marginale mesure la productivité induite par une unité de facteur supplémentaire employé.

+ La théorie libérale montre comment évolue la productivité au cours du temps. La loi des rendements décroissants, mise en évidence par Ricardo, montre que, lorsque l’on augmente un facteur de production alors que l’autre reste constant, la productivité de ce facteur commence par augmenter, puis elle devient stationnaire avant de se mettre à décroître, et elle peut même devenir négative (ex : dans un atelier, on ne peut pas augmenter indéfiniment le nombre de travailleurs en gardant les mêmes machines car à la longue ils finissent par se gêner). C’est pourquoi la croissance intensive est meilleure que la croissance extensive.

2- Evolution de la productivité

+ La période des 30 glorieuses a été pour les PDEM une période exceptionnelle caractérisée par un haut niveau de progrès technique expliquant un tiers de la croissance. La productivité du travail s’est accrue à un rythme accéléré, de même que la productivité du capital. La forte croissance du PIB a donc été obtenue grâce à une croissance intensive. En effet, durant cette période l’emploi n’a crû que de 0,2% par an en moyenne contre plus de 4% pour la productivité du travail. C’est donc l’amélioration de la qualité du travail qui explique ces gains de productivité.

+ Depuis le début des années 70 au contraire, la croissance est ralentie : 1 à 2 % en moyenne contre 5% pour la période précédente, de même que le rythme du progrès technique a ralenti, ainsi que la productivité et l’emploi. On peut dire qu’il y a une corrélation entre ces grandeurs qui est résumée par « l’équation fondamentale de l’économie » :

Taux de croissance = Taux de croissance + taux de croissance

    du PIB                             de l’emploi                 de la productivité

Cette équation montre la liaison existant entre productivité et emploi : certains pays préfèrent privilégier la productivité au détriment de l’emploi (France, Allemagne), tandis que d’autres jouent l’emploi contre la productivité (E-U, R-U). Seul le Japon semble arriver à concilier les deux.

Toutefois l’accélération du progrès technique en cette fin de siècle paraît redonner de la vigueur à tous les indicateurs de l’équation.

3- L’analyse de la productivité

+ Selon les libéraux de la nouvelle école classique (NEC) la productivité du travail s’accroît avec l’accumulation du savoir et du savoir-faire. Ainsi R. LUCAS (prix Nobel 1997) et P. ROMER mettent l’accent sur le « Capital humain » qui serait responsable d’une croissance endogène, c’est-à-dire due aux facteurs eux-mêmes et non à un « résidu » exogène.

+ L’école de la régulation met plutôt l’accent sur les effets de la productivité résumés dans le cercle vertueux proposé par A. GRAMSCI (transparent 3).

La productivité des 30 glorieuses a permis de passer à l’ère de la consommation de masse. Mais au fur et à mesure que le niveau de vie augmente, la structure de la consommation évolue selon la loi d’ENGEL (transparent 4), ce qui explique les transformations structurelles qui se produisent.

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B/  Les mutations sectorielles                                                

1- Evolution de la structure de la production

+ J. FOURASTIE a repris la définition des grands secteurs d’activité de C. CLARK en montrant comment la productivité de chaque secteur déterminait son évolution. Selon lui, le secteur primaire est un secteur à progrès technique moyen et donc où les gains de productivité sont modérés, le secteur secondaire où le progrès technique est important a une forte productivité, et le tertiaire à faible progrès technique a aussi une faible productivité. La théorie du déversement de J. FOURASTIE montre comment évoluent les trois secteurs en fonction du développement d’un pays (transparent 5). Au fur et à mesure qu’un pays se développe, on voit décroître le secteur primaire au profit des deux autres secteurs, puis c’est la désindustrialisation qui provoque la tertiarisation de l’économie. Les PDEM montrent ainsi aujourd’hui un secteur tertiaire prépondérant (employant 65% de la population active en France en 1990 et 75% aux E-U), un secteur secondaire en perte de vitesse (30% de la PA en F en 1990 et 23% aux E-U), et un secteur primaire résiduel (5% de la PA en F en 90; 2% aux E-U).

+ Selon J. FOURASTIE c’est l’évolution simultanée de la productivité et de la demande de consommation qui expliquent ces évolutions. En effet selon la définition, La productivité du travail = Production / Emploi (MO employée) => Emploi = Production / Productivité et puisque la production varie en fonction de la demande :

                     D Emploi = D Consommation / D Productivité

 

Evolution de la productivité

 

Forte

Moyenne

Faible

Faible

Emploi baisse rapidement

Ex : II depuis crise

Emploi baisse

 

Ex : I aujourd’hui

Emploi stable

Moyenne

Emploi baisse

Ex : II aujourd’hui dans PDEM

Emploi stable

Emploi augmente

Forte

Emploi stable ou augmente si D>Pdté

Emploi augmente

Ex : III demain car Pdté devient plus forte

Emploi augmente rapidement

Ex : III aujourd’hui

Le tableau montre que d’une époque à l’autre, il peut y avoir des changements dans les évolutions (ex : aujourd’hui la productivité est plus forte que la demande de consommation dans le secteur secondaire, ce qui n’était pas le cas durant les 30 glorieuses.

2- Evolution des secteurs

+ Aujourd’hui les trois secteurs deviennent de plus en plus interdépendants (ex les Industries agroalimentaires (IAA) qui transforment de manière industrielle les produits de l’agriculture). La transformation des secteurs remet alors en cause leur spécificité.

+ Ainsi le secteur agricole est désormais soumis à la logique marchande : elle utilise en amont des intrants d’origine industrielle (machines, engrais, pesticides) et en aval elle fait appel aux services (transports, commercialisation, services financiers, gestion). Si elle est peu importante prise seule (4%du PIB et 5% de la MO en F), elle pèse lourd lorsqu’on considère l’ensemble agriculture + IAA (15% du PIB et 16% de la MO).

+ L’industrie est devenue moins importante depuis la crise : la production industrielle ralentit considérablement (+ 2% par an en moyenne depuis 1973 contre + 6,5% entre 1960 et 1970). On parle alors d’une désindustrialisation qui utilise de moins en moins de MO. Le Japon et l’Allemagne sont moins affectés que les E-U, la F et surtout le R-U, pays d’industrialisation plus ancienne. Et ce sont les vieilles industries qui déclinent le plus (textile, sidérurgie, chantiers navals).

+ La tertiarisation est le corollaire des transformations affectant l’industrie qui se restructure et externalise de plus en plus de services (entretien, gardiennage, recrutement, etc.). Elle est aussi liée à l’évolution de la demande en forte hausse dans certains secteurs (santé, éducation, social, grande distribution). Le tertiaire occupe aujourd’hui un poids prépondérant dans la valeur ajoutée et l’activité globale (70% du PIB et 65% de la MO en F en 1990).

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C/    La concentration des entreprises                                    

1- Les modalités

+ La concentration est un mouvement de regroupement d’entreprises qui aboutit à la réduction de leur nombre et au développement de leur taille. Elle peut être horizontale (au même stade de finition du produit), verticale (dans des productions complémentaires en amont ou en aval) ou conglomérale (dans des activités différentes). Elle peut se faire par absorption (E absorbée perdent leur identité juridique), par fusion (alliance ou mariage dans laquelle chaque entreprises apporte sa part) ou par prise de participation (achat de parts de la société).

+ Elle revêt des formes différentes selon les pays : trust aux E-U (combinaison financière d’E passant sous direction unique), Konzern en All (malgré la direction unique, les entreprises conservent leur indépendance juridique), groupes en F (mélange des 2 : société mère + filiales contrôlées à 100% + E indépendantes malgré des participations croisées), Zaibatsu au Japon (groupes industriels ayant leur propre réseau de distribution, les sogoshosha et leur banque attitrée. Les Kéiretsus représentent l’alliance banque /entreprise /réseau commercial).

2- L’analyse de la concentration

+ La concentration est la négation des hypothèses néoclassiques de la concurrence pure et parfaite car la grande taille permet d’influencer le marché (pas d’atomicité), de proposer des produits différenciés (pas d’homogénéité), en limitant l’information (pas de transparence). Elle permet alors de verrouiller le marché à l’entrée de nouveaux concurrents (pas de fluidité, ex Microsoft) et d’empêcher la mobilité des facteurs de production (par des contrats draconiens ou un niveau trop élevé de capital technique). Le marché ne peut donc pas jouer librement et la « main invisible «  ne fonctionne plus.

+ Pour J. A. SCHUMPETER la concurrence est source de gaspillage dans la bataille qui oppose les entreprises. Au contraire la grande entreprise, par les capitaux dont elle dispose peut financer des investissements en R-D très coûteux. Pour lui, le monopole est un avantage qui permet l’innovation et une amélioration de la qualité des produits profitable aux consommateurs.

+ Selon J. K. GALBRAITH, dans le capitalisme contemporain, la marche des entreprises la marche des entreprises repose sur une technostructure, c’est-à-dire non pas sur l’initiative des propriétaires du capital, mais sur un ensemble d’individus dotés de compétences techniques et scientifiques (ingénieurs, managers). En effet la complexification des techniques exige à la fois des capitaux et un savoir-faire élevé que seule la grande entreprise peut assurer. Le pouvoir échappe alors aux actionnaires au profit des managers qui, seuls détiennent des informations complètes qui leur confèrent un pouvoir de décision considérable. Selon GALBRAITH  le marché est instable et fluctuant alors que les entreprises ont besoin de  pouvoir anticiper et investir. Le profit n’est plus alors leur objectif prioritaire, mais plutôt la réduction des incertitudes, qui fragilise les entreprises en période de crise.

Il s’oppose alors à la vision néoclassique de la souveraineté du consommateur qui, par ses choix, orienterait la production des entreprises. Au contraire, selon lui, la filière est inversée (transparent) car ce sont les grandes entreprises qui décident à elles seule, de produire en telles quantités et à tel prix, et se débrouillent ensuite pour que le marché absorbe leur production (publicité, promotion de marketing).

Selon le mot d’A. CHANDLER Jr: « aujourd’hui, la main visible des managers a remplacé la main invisible du marché ».

3- La stratégie des entrepreneurs

+ Les entrepreneurs ont des objectifs variés, selon lesquels ils mettront en œuvre des moyens différents. Ainsi ils vont se spécialiser pour conquérir un marché grâce à la concentration horizontale, tandis que la concentration verticale leur permet de réduire l’incertitude en contrôlant approvisionnements et/ou débouchés, et la concentration conglomérale répond à un objectif de diversification et de répartition des risques. De même, grâce à la concentration par absorption ou par une prise de participation majoritaire les entreprises peuvent prendre le contrôle d’un concurrent alors que la fusion leur permet de s’associer avec lui en partageant les connaissances technologiques. Dans les deux cas les entreprises bénéficient d’un effet de synergie en réalisant des économies d’échelle. Enfin l’OPA et l’OPE sont plutôt l’œuvre de raiders sans scrupules qui cherchent à réaliser des plus values faciles, sans se soucier de la survie des entreprises qu’ils rachètent et revendent par morceaux.

+ La concentration a donc été différente selon les époques dans les PDEM. Dans les années 60 il s’agissait de constituer de grands groupes capables d’affronter la concurrence au moment de l’élargissement des échanges provoqué par la création du marché commun européen (traité de Rome) et l’ouverture internationale (GATT). Elle s’est alors surtout réalisée par absorptions et par fusions. Au contraire dans les années 80 la concentration s’est plutôt faite par OPA et par OPE inamicales, grâce à l’assouplissement des marchés financiers (3D : désintermédiation, décloisonnement, dé…). Pour finir, la fin des années 90 montre un retour aux concentrations à but industriel, aux accords de coopération et une constitution de grands réseaux semblables aux Keiretsu afin de résister à l’internationalisation des échanges.

+ C’est donc à une concentration multinationale à laquelle on assiste aujourd’hui qui permet d’abaisser les coûts de production grâce à la délocalisation (PVD), d’élargir les débouchés par une implantation directe sur des vastes marchés (Chine) ou sur les marchés protégés (Europe), de bénéficier d’avantages fiscaux (PVD) ou d’accéder à une technologie de pointe (E-U).

Conclusion

Les mutations de l’appareil productif des PDEM sont aujourd’hui aussi importantes que pendant la 1° RI . On assiste ainsi à une nouvelle RI axée sur les nouvelles technologies de l’information et sur les biotechnologies (OGM), qui bouleversent les structures économiques et modifient le marché du travail (cf. schéma).

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 Mme SODAIGUI, professeur de Sciences Economiques et Sociales